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Jodla 02/05/06
Immigration : discours et réalités


Le sénateur Othily (qui a conduit récemment une commission sénatoriale sur l'immigration) était l'invité de 7 en Guyane
Alors qu'est présenté jodla à l'Assemblée nationale le projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration, nous parvient une lettre ouverte des capitaines du village Bushinengué de Kourou - jusqu'ici restée apparemment inédite - adressée le 28 mars au préfet de Guyane (donc avant l'incendie au village), et remise à Juliana Rimane pour transmission à Jacques Chirac et à Nicolas Sarkozy :

Capitaines du village Bushinengué de Kourou
M. Bruno Apouyou
M Ngwete Adaisso
M Kago Afoeja
12 rue du Maroni - 97310 Kourou

à M le Préfet de Guyane
Objet : régularisations de personnes aluku, ndjuka, saramaka et paramaka présentes sur le territoire français depuis de nombreuses années.

Le 28 mars 2006
LETTRE OUVERTE

Monsieur le Préfet,

Nous souhaitons vous rappeler les souffrances endurées par la population du village bushinengué de Kourou, qui concernent également, dans tout le département, les personnes de nos communautés qui ne sont pas nées sur le territoire français mais sur l’autre rive du Maroni en territoire surinamien. Nous vous rappelons qu’historiquement nos populations ont toujours vécu des deux côtés du Maroni depuis plus de 300 ans. Ces personnes sont venues depuis des années soit pour travailler dans des entreprises françaises ou au service de l’Etat français, à l’époque où la législation n’était pas aussi exigeante, soit à la suite de la guerre civile du Surinam. D’autres sont arrivées plus récemment car nos peuples ont toujours été mobiles et poly résidentiels. Ces personnes vivent paisiblement en Guyane et n’ont jamais eu affaire à la police.
Ces personnes rencontrent beaucoup de difficultés quand elles essaient de se faire régulariser et n’arrivent pas à se voir reconnaître leurs droits, notamment dans l’accueil inhumain au guichet à la Préfecture. Très souvent leurs lettres de demande sont déchirées et elles doivent les refaire devant la personne du guichet. Pour beaucoup d’entre elles qui n’ont pas de bagage scolaire ou qui maîtrisent mal le français c’est impossible. De plus il leur est difficile de fournir des preuves écrites de leur présence continue car nous sommes encore dans la tradition orale et nous n’avons pas tous accès à la modernité et à la consommation : Il est très difficile de montrer des factures de toute sortes pour prouver année après année la présence sur le territoire français. Jusqu’en 1998 les autorités françaises et vos services nous ont autorisés, nous les Capitaines, à faire des attestations de présence et des laisser passer entre la France et le Surinam.
Certes nous comprenons qu’il ne soit pas simple d’intégrer ces populations mais quand nous apprenons que M Sarkozy compte durcir encore les lois sur l’immigration, rendant toute régularisation quasiment impossible et condamnant à la clandestinité à vie les gens de nos communautés, nous sommes très inquiets.. Ces projets nous paraissent lourds de menaces dans un territoire multiculturel comme l’est la Guyane.
Nous sommes tout particulièrement préoccupés par l’avenir de notre jeunesse qui se sent rejetée par la France et nos jeunes ont beaucoup de mal à se reconnaître citoyens d’un pays qui refuse de prendre en compte des gens de leur famille ou leurs amis proches.
Nous vous demandons, Monsieur le Préfet, de bien vouloir nous accorder un entretien pour examiner notre demande de régularisation des personnes qui habitent en Guyane de façon habituelle et depuis longtemps, sans avoir eu de problèmes avec la Justice, en collaboration avec nous et conformément aux droits que leur donne la loi française. Vous avez su faire appel à notre médiation en cas de graves conflits et nous avons montré à plusieurs reprises que nous pouvions être un facteur de cohésion sociale dans ce pays.
Nous attirons en particulier votre attention sur les dossiers de plusieurs anciens dont les demandes à vos services sont restées sans réponse depuis plus de 2 ans et dont les pièces originales ont été gardées par vos services.
Vous nous avez fait part de vos inquiétudes sur la venue massive de gens de l’intérieur du Surinam mais elles ne nous paraissent pas fondées et nous veillerons pour notre part à ce que cette régularisation ne concerne que les personnes qui résident en Guyane depuis de nombreuses années, en accord avec les autorités bushinengués du Surinam et dans le cadre de la coopération binationale qui doit se développer entre la France et le Surinam grâce aux actions engagées par le Ministère des Affaires étrangères.
Dans l’attente de votre réponse, soyez assuré, Monsieur le Préfet, de notre profond respect des lois de ce pays dont nous demandons une adaptation en ce qui concerne le Code d’Entrée et de Séjour sur le territoire (CESEDA), pour une population qui ne saurait être historiquement considérée comme étrangère et irrégulière.
Avec notre considération.


Sur le projet de loi relatif à l'immigration et à l'intégration », dans la presse en ligne :

Ministère de l’intérieur Les objectifs du projet de loi sur l'immigration

Radio France Internationale : La commission des Lois a adopté le projet
RFI encore (fichier audio) : Partir ou mourir

Libération  : L'étranger, ce bouc émissaire

Le Monde :
Les principales mesures de l'avant-projet de loi sur l'immigration

L’Humanité :
Contre le projet de loi sur l’immigration

Le Figaro :
Le ministre de l'Intérieur a voulu être le seul pilote du projet

RTL (document audio) :
L'immigration, inévitable et indispensable

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