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Jodla 23/07/12
« André, sans frapper... » : une note de lecture de FF

André Paradis a écrit un beau livre. Un très beau livre. Avec une manière de raconter qui vous replonge dans des rêves éperdus. Il y a dans ce livre de la délicatesse, de l’attention pour l’autre, une pudeur dans l’expression des sentiments pour celles qu’on aime. Victor, créole guyanais célibataire, écrivain sans le sou, habite une ancienne cuisine au fond d’une cour de Cayenne et visite parfois sa mère pour se remettre à flots financièrement. Si le zouk l’insupporte, il sacralise le reggae calypso d’un ancien grand amour. Il s’aperçoit que sa voisine d’en face a la même clef que lui. Sans doute une pingrerie de leur propriétaire commun dont l’idéal se résume à lustrer sa voiture. Cette voisine apparemment revêche finira par s’intéresser au livre qu’il écrit. Une histoire d’amour poignante entre un vieil homme blanc, dont le service trois pièces a rendu l’âme, et une jeune femme noire atteinte d’une sorte de maladie mentale, qui dissimule sa grande beauté.

Sur fonds de meurtres anecdotiques et d’orpailleurs revendicatifs, le livre ne souffre pas de temps mort, mais ses huis clos en constituent le véritable trésor. Son titre « Dès l’or, Victor » s’avère une fausse piste, ses pépites sont ailleurs, cet ailleurs où est la vie. Le style est sobre, le livre agréable à lire. Il y a des trouvailles comme cette « voix aurifiée » lors d’une saynète avec des clandestins de l’or. On y fait l’humour pas la guerre. De temps à autre, André Paradis glisse un tour de malice. Illustration ? Victor s’écroule de sommeil, dans le studio de ses voisines (devenues deux) endormies dans le sien. Mais un ronron technologique ramène à la réalité ce héros qui se narre : « Je fus tiré d’un sommeil profond par la vibration de mon portable contre mon testicule droit ». Un roman d’humour et de sentiments qui vous réjouit et vous humanise durablement.