Un piroguier poursuivi accuse de double jeu une interprète de la gendarmerie
L’affaire dite des « commerçants de Saint-Elie » où 21 personnes doivent comparaître en correctionnelle à partir de lundi, pour au moins deux jours de procès1, fourmille d’anecdotes peu banales et de témoignages en tout genre. Un piroguier poursuivi a ainsi mis en cause une interprète de la gendarmerie l’accusant de double jeu. Au parquet et à la gendarmerie, on n’a officiellement « pas connaissance » de la moindre procédure judiciaire sur le sujet…
Dans cette affaire dite « des commerçants de Saint-Elie », parmi les 21 personnes poursuivies, on trouve en majorité des commerçants de cette commune isolée, mais aussi des habitants de « PK6 ». Ce village, en majorité habité par des ressortissants brésiliens, se situe à quelques kilomètres de Kourou, après une bifurcation sur la gauche de la RN1 lorsque l’on prend la direction de Sinnamary. Certains habitants de PK6 sont soupçonnés d’avoir participé au transport de denrées et de clandestins. Parmi les mis en examen figure au moins un piroguier officiant sur le lac de Petit Saut. Renvoyé en correctionnelle dans cette affaire, l’un de ces piroguiers, détenteur d’un titre de séjour de 10 ans depuis 2002, a tenu des propos étonnants, début juin 2008, à la fois au cours de sa garde à vue devant les gendarmes et, par la suite, devant le juge d’instruction. Il a affirmé qu’une femme, interprète de la gendarmerie, jouait alors, depuis plusieurs années, un double jeu avec double rémunération. Selon ce piroguier, elle assurait la traduction pour les gendarmes, des déclarations de personnes auditionnées avant d’aller raconter le « contenu » de ces déclarations aux personnes mises en cause au cours de ces auditions. Ce que rend compte à sa manière le PV d’audition de ce piroguier datant du 2 juin 2008 : « A Petit Saut, tout le monde en parle et il se dit que si l’on se fait attraper, cette interprète rapporte tout ce qui a été dit au cours des gardes à vue (…) il ne faut plus faire travailler cette personne car c’est une balance. Comme cette interprète répète tout ce qui se dit à la gendarmerie, les personnes qui parlent trop pendant leur garde à vue risquent d’être tuées lorsqu’elles sont remises en liberté (…) Je ne connais pas son nom. P. et A. (2) m’ont déjà parlé d’elle. Je sais même qu’elle fait payer ses services. Par exemple, si une personne se fait interpeller, l’interprète va voir, après la garde à vue, les personnes qui ont été balancées. Elle dit à ces personnes ce qui a été balancé sur leur dos et demande, après, une compensation pour les informations qu’elle donne ». Interrogé, par la suite, sur ces accusations, par le juge d’instruction Samuel Finielz chargé de l’affaire « Saint-Elie », le piroguier les avait confirmées. Si un magistrat du parquet m’affirmait il y a quelques mois « avoir entendu parler de cette histoire », à la gendarmerie on affirme « ne pas avoir connaissance de tels faits ». Il y a quelques mois, interrogé sur le sujet, le procureur François Schneider, chargé du dossier orpaillage (mais pas encore en Guyane au moment de cette audition) m’assurait « ne pas être au courant » d’une telle affaire. Un officier de gendarmerie m’a, lui, indiqué, plus récemment, avoir le souvenir de cette audition mais que de telles accusations n’auraient été « ni précisées ni corroborées ».
FF
1. Le procès est prévu lundi 17 et mardi 18. « Si nécessaire, le procès se prolongera mercredi 19 » m’a confié un magistrat du siège.
2. Nous n’avons gardé que les initiales de ces deux autres personnes citées par le piroguier.
passer une petite annonce
passer une annonce de covoiturage
passer une annonce d’emploi
associations, postez vos actualités
participez au courrier des lecteurs
Lancements 2022
Vol 259 Ariane 5