Au mois d'août, le Mouvement de Décolonisation et d'Emancipation Sociale (MDES) a organisé des réunions et conférences pour préciser la ligne politique du parti sur différents thèmes, à partir de faits historiques et de l'actualité économique.
C'est ainsi que le vendredi 18 août, lors du débat qui suivit la conférence de Pierre HO CHOUNG TEN sur "
l'occupation du territoire aux temps de l'orpaillage", Pierre REY ce "
soldat du développement" comme il se nomme lui-même, en a profité pour dire longuement tout le bien qu'il pensait du projet Cambior soumis, selon lui, à "
des critiques fantaisistes".
La préservation de la nature face aux menaces qui planent sur la planète et le sort de nos descendants ne semblent guère inquiéter "KIKO" l' orpailleur, qui dans une logique qui est la sienne, s'arroge le droit de polluer au prétexte, dit-il, que 600 tonnes de produits chimiques seraient répandus annuellement par les Hmongs en agriculture, sans contraintes administratives.
Il affirme haut et fort que l'orpaillage relève du développement durable, persuadé que les générations futures pourront, comme lui le fait sur les placers des "Anciens", continuer à exploiter l'or qui échappe actuellement aux quelques tables à secousses en service, grâce à de nouvelles techniques à venir.
Il parle de "dignité" à offrir à la jeunesse guyanaise, comme si la majorité des travailleurs de l'industrie minière ne se recrutait pas chez nos voisins, grâce à l'usage éhonté des APT (autorisation provisoire de travail; en fait une dérogation au droit du travail, en principe réservée aux travaux saisonniers). Comme si l'examen des dommages collatéraux de l'activité minière pouvait permettre de la citer en exemple : "
En tout état de cause, ces désordres sont inadmissibles au regard de leurs effets dévastateurs sur une jeunesse à qui il est urgent d'offrir d'autres schémas moraux "(Christiane TAUBIRA ,
L'or en Guyane, p.62 et 63).
Pierre REY se plaint aussi de ce que l'administration ne réponde pas à une demande d'AEX, sachant pourtant qu'elle entre dans le périmètre de conservation du biotope de Saül, donc irrecevable ! Rappelons que le maire, Mr Hermann CHARLOTTE, ne veut pas d'orpaillage dans un rayon de 20 kms autour de sa bourgade et que la demande d'AEX est située à 10 kms environ de SAÜL. Est-ce pour cela que cet orpailleur en compagnie de certains autres, a été vu à Saül, vantant généreusement tous les avantages que pourrait retirer la commune de l'orpaillage ? Saül, symbole de ce qu'était la Guyane il n'y a pas si longtemps encore, entre nature préservée et bonheur tranquille des habitants, qui vit sans doute ses dernières heures de paix alors qu'un camion de 30 tonnes appartenant à la Société AUPLATA (France-Guyane du 31/3/06) est déjà passé en force aux abords du bourg pour se rendre à Maripasoula, et qu'une bonne centaine d'orpailleurs clandestins, alimentée par un non clandestin local, sont déjà à pied d'oeuvre sans être aucunement inquiétés par la gendarmerie pourtant parfaitement prévenue.
Pierre REY passera en correctionnelle le 14 septembre 2006 pour répondre de la traversée et de la construction sauvage de 8 ponts au travers de la réserve des Nouragues aux fins de transporter du matériel à Saül. Cette même réserve des Nouragues ou furent assassinés en mai dernier Capi et Domingo, piroguiers du camp ARATAÏ.
Comme Cambior, Pierre REY sait pouvoir compter sur le soutien musclé du MEDEF et de la FEDOMG. Faut-il rappeler qu'un trésorier de ce syndicat dirigeait la SOGUYEM à Ipoucin et fut en délicatesse avec la justice, "
3 ans après avoir signé une charte de bonnes pratiques professionnelles aux côtés de la Ministre de l'Outre-Mer" , pour avoir oublié de déclarer "
huit des 15 à 20 ouvriers de son chantier, notamment des étrangers en situation irrégulière" (France Guyane du 9/12/04).
Le seul combat perdu est celui que l'on ne livre pas !Osons croire que les citoyens de ce pays prenant enfin, avec courage et lucidité, la mesure de ce que coûte à la collectivité les dégâts occasionnés par l'industrie minière telle qu'elle est pratiquée aujourd'hui, admettront que l'orpaillage n'est pas la seule voie possible de développement, pas plus qu'une fatalité culturelle.
Comment ne serions nous pas capables, tous ensemble, d'élaborer une politique minière sur le long terme, mesurée, maitrisée, respectueuse de l'environnement et du droit des générations à venir.
A qui fera-t-on croire qu'en expliquant les choses, en aidant les orpailleurs à orienter leur courage et leur force de travail vers des reconversions plus profitables à la société, un consensus autour d'un moratoire sur l'or ne serait pas possible et admissible par une majorité de citoyens ?
Quel savant peut prétendre en 2006 que l'activité humaine n'est pas responsable du réchauffement climatique ? qui ignore aujourd'hui que 80% des forêts primaires de la planète ont déjà disparu ? Que notre forêt et ses cours d'eau vaudront bien plus que l'or dans quelques années ?
« La liberté c'est l'activité, mais l'activité qui sait poser ses propres limites.»
Cornélius Castoriadis,
Extrait de "La Montée de l'insignifiance",
entretien avec C.C, de l'émission "Là-bas si j'y suis" de Daniel Mermet sur France Inter.
Un large concensus se réalise aujourd'hui en Guyane contre le projet minier de Cambior. Nous devons nous, citoyens de Guyane, nous féliciter de cette prise de conscience responsable et solidaire, toutes tendances confondues. Il serait bien étonnant, à moins de faire donner la Légion contre le peuple, que l'état passe outre l'avis du conseil Régional et Général. Ce serait une grande première dans l'histoire des DOM-TOM.
Est-il naïf d'espérer une Guyane attachée à la défense de son territoire et ayant choisi de réduire l'exploitation d'un bien commun nommé OR, à quelques mines travaillant pour le bénéfice de la collectivité tout entière et non pas au profit de quelques-uns ? Une Guyane débarrassée des porteurs "
d'intérêts hypocritements dissimulés", faisant l'Union Sacrée pour EXIGER de l'Etat les mesures nécessaires à sa sécurité sur l'ensemple du pays ?
Pour retrouver une paix qu'elle n'aurait jamais dû perdre.