Le 11 décembre 2002, le premier tir de l’Ariane 5 ECA, capable d’embarquer près de 10 tonnes de satellites à placer en orbite géostationnaire, se soldait par un échec retentissant. Ce soir là, dans la salle Jupiter du Centre Spatial Guyanais (CSG), le directeur général (son titre à l’époque) d’Arianespace, Jean-Yves Le Gall, K.O. debout, personnifiait à lui seul les enjeux de cette nouvelle version d’Ariane 5. La « 10 tonnes » devait sortir, disait-on à l’époque, à moyen terme, sa société du rouge où elle était alors engluée (105 millions d’euros de pertes en 2002, 193 en 2001 et 242 en 2000). Quasiment dans la foulée, le programme Egas avait accordé un sursis de 5 ans à Arianespace en finançant, au travers de l’opérateur de lancement, une partie des coûts fixes des industriels concernés par les programmes Ariane. En février 2004, 960 millions d’euros avaient ainsi été débloqués, sur la période 2005-2009, par 9 des pays de l’ESA (Agence Spatiale Européenne) « À condition que le prix du marché ne continue pas à se casser la figure, l’objectif est de sortir du programme Egas en 2009 avec un lanceur ECA en équilibre financier. Il faut le qualifier, le stabiliser, ne plus le modifier et le produire de manière industrielle » confiait fin 2004 à l’auteur de ces lignes pour RFI, Jean-Charles Vincent, directeur d’Arianespace en Guyane à l’époque. Le plan « Egas » a pris fin en 2010.
Mais les Etats-membres ne s'attendaient pas à remettre la main à la poche. « C'est vrai qu'en 2008, lors de la dernière réunion ministérielle, on leur avait dit qu'une fois Egas terminé, il n'y aurait plus besoin de subventions », a reconnu fin janvier dernier Yannick d'Escatha, le président du Centre national d'études spatiales (CNES), cité par les Echos.
« Des concurrents dont les fusées sont fabriquées en Russie avec des coûts très bas »
Jean-Yves Le Gall, aujourd’hui PDG d'Arianespace, estime à 120 millions par an la subvention publique nécessaire pour continuer à effectuer six à sept tirs par an, toujours selon le quotidien économique. Le CNES avançant, pour sa part, sur le sujet que les prix de vente restent inférieurs au coût des lancements et que l'Europe ne réalise pas assez de tirs institutionnels depuis Kourou, ce dernier point étant un leitmotiv des dirigeants français du spatial depuis de nombreuses années.
Dans un récent entretien accordé aux Echos, Jean-Yves Le Gall a, lui, ainsi justifié ce besoin de 120 millions d’euros annuels : « Cette somme représente 20 millions par lanceur si l'on se base sur six tirs d'Ariane par an. Soit 10 % de subvention du coût de production de chaque fusée pour maintenir en capacité des usines qui ont été financées par les Etats membres ».
Fin 2010, le prix moyen payé par les clients d’une Ariane 5 était estimé à 150 millions d’euros, prestations de service comprises. Interrogé à Kourou sur le sujet, par l’auteur de ces lignes, Jean-Yves Le Gall l’avait ainsi confirmé : « c’est l’ordre de grandeur qui est correct. Aujourd’hui, c’est à peu près le niveau de prix auquel on vend pour une Ariane 5, ensuite il faut se répartir entre les deux satellites ». Ses récentes déclarations, dans les Echos, indiquent-elles dès lors que le coût de production d’une Ariane 5 est de plusieurs dizaines de millions d’euros supérieur à ce que paient les clients d’Arianespace à chaque tir ? a demandé l’auteur de ces lignes à Jean-Yves Le Gall mercredi soir après le succès de V200 : « Oui » a répondu le PDG d’Arianespace, « parce qu’on est dans un secteur extrêmement concurrentiel avec des concurrents dont les fusées sont fabriquées en Russie avec des coûts très bas. C’est la problématique à laquelle on est confronté et avec, où que ce soit dans le monde, des Etats qui prennent en charge des pas de tirs, des infrastructures de lancement… c’est pour ça que je demande un soutien pour l’activité d’Arianespace ».
FF
Illustration : Vol 200 au décollage - Photo ESA-CNES-ARIANESPACE/Photo Service Optique CSG
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