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Jodla 10/12/09
''Bertrand and co'' : La Semaine Guyanaise au pays de SAS

La couverture de la Semaine Guyanaise aux couleurs d'un SAS pour évoquer l'affaire « Bertrand and co » sous la plume de Frédéric Farine, quoi de plus normal pour ce mauvais roman policier guyanais qui pourrait nous emmener jusqu'en europe et aux Etats-Unis, avec disparition mystérieure d'un homme, Myrtho Fowel. Sauf que les écrits ne font ici jamais des succès de librairie, et même « Canal Laussat » n'a jamais dû dépasser quelques milliers d'exemplaires, dans le meilleur des cas. En 15 mois au gouvernement, le ministre du carburant n'a trouvé que deux lignes à écrire sur la Guyane*. A croire que ça n'intéresse personne.

Il y a pourtant un polar à écrire sur tout cet argent public qui se volatilise dans des poches mystérieuses, dans l'indifférence quasi générale, pendant des années, des années, et des années. On en retrouve quelques traces ici ou là, comme cette Jaguar de Léon restée à Paris et payée 120 000 euros, achetée après avoir vendu trois Porsche, alors qu'il devait déjà 130 000 euros aux impôts. Léon, c'est vraiment pas raisonnable ! Fallait suivre le stage très prisé des élus « comment se comporter en cas de mise en examen » !

Au centre de la tourmente qui a conduit sous les verrous huit personnes mises en examen (pour l'instant, trois des collaborateurs de Léon, trois chefs d'entreprises et un architecte), deux des avocats mandatés ont été longuement interrogés par Frédéric Farine dans ce numéro de La Semaine Guyanaise : Maître Patrick Lingibé (l'un des trois avocats de Léon Bertrand) trouve « déplacées » les questions posées par les policiers à son client lors de l'audition, et Maître Jean Jean-Joseph (avocat de Richard Cheung-A-Long, ex avocat du maire de Roura) ne peut vraiment pas croire qu'on puisse dépenser 200 000 euros en voyages : « Mais, c'est énorme ! Ils sont allés en Chine, ils ont fait le tour du monde, ce n'est pas possible ! ». Une bien petite dépense pourtant (en comparaison des sommes en cause) qui avait été commandée en 2008 par la mairie de Saint-Laurent à Ouest Voyages Guyane, l'entreprise de Richard, « cousin et bras droit de Léon », mis en examen, selon Frédéric Farine, pour « favoritisme, corruption passive "et" prise illégale d'intérêt ».

* Yves Jégo, secrétaire d'Etat chargé de l'Outre-mer entre mars 2008 et juin 2009.
Dans « 15 mois entre faux gentils et vrais méchants » paru chez Grasset, il zappe sur le conflit en Guyane et revient longuement sur celui des Antilles, plus populaire dans la presse nationale. A la page 128 du livre, un passage irrésistible invite les élus à la méditation :

« J'aime, j'ai toujours aimé l'Histoire. J'ai même coécrit deux romans historiques. Et je dis modestement qu'être assis à la table du Conseil des ministres, c'est quand même être au coeur de l'Histoire immédiate. Bien sûr, il faut rester simple et je l'ai compris très vite. Etre élu maire à trente-quatre ans, pour moi, petit provincial, être appelé "monsieur le Maire", c'était un événement. Un soir, il était tard, c'était peu de temps après mon élection, nous étions dans les rues de Montereau avec mes parents. Je suis fils unique, ils étaient venus me voir, très fiers eux aussi : je leur avais fait visiter la mairie, voir mon bureau. En sortant, une voiture ralentit à notre hauteur. A l'intérieur, un jeune avec une casquette à l'envers sur la tête a ouvert sa vitre et a dit : "Oh le Maire, gros bâtard !" Ça vous ramène à la réalité. »