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Jodla 19/01/09
C’est bien de Justice que nous avons besoin

L’actualité du moment est un bel exemple du cruel besoin de justice dans notre département. Vendredi dernier avait lieu le procès de deux commerçants de Saül qui ravitaillaient depuis des années les orpailleurs clandestins, et aujourd’hui commence celui de Claude Polony, accusé de mille et un abus à la tête de la municipalité de Roura, sans jamais avoir été sanctionné par le verdict des urnes. (Signalons à l’occasion que France-Guyane inaugure ce jour sur son site une formule intéressante : le procès de Polony heure par heure.) Combien d’années aura-t-il fallu pour mettre en accusation un élu dont les pratiques étaient une véritable offense à la démocratie ?

La pauvreté des moyens de la justice en Guyane est peut-être le plus grand de nos malheurs. Cette carence est d’autant plus désespérante qu’elle est dans la continuité historique de l’injustice permanente faite à la Guyane à travers le temps. Rappellons-le encore une fois, quitte à nous répéter, que l’accès au droit en Guyane a toujours été une longue suite d’injustice comme l’a si bien démontré Patrick Lingibé dans sa « Genèse de l’accès au droit en Guyane ».

La télévision avait diffusé en 2006 un reportage tourné au tribunal de Cayenne : « Cayenne express », qui est toujours en ligne (Episode 1 et épisode 2) et qui avait suscité à l’époque bien peu de commentaires. On se demande pourquoi. Et pourtant…
Au-delà de la tournure folklorique de ce type de documentaire, on y voit notamment un certain jugement (sans caractère de gravité il est vrai) qui a dû faire hurler de rire la moitié de la Guyane… où le prévenu semblait avoir retrouvé comme par magie toute sa virginité. Mais où sont donc les dossiers de la justice ?

Souvenons-nous à l'occasion que les Etats-Unis, après avoir utilisé toutes les méthodes policières possibles pour venir à bout de la tyrannie d’Al Capone à l’époque de la prohibition, ont réussi à le mettre hors d’état de nuire… grâce à un contrôle fiscal.

L’affaire des commerçants de Saül, qui pourrait paraître à première vue anecdotique, est pourtant exemplaire. Selon ce qui a été dit à l’audience de vendredi 16 janvier 2008 (information rapportée par un lecteur), ces commerçants auraient fait venir des marchandises sur Saül par Air Guyane : en 2006 : 56 tonnes, en 2007 : 68 tonnes, en 2008 : 81 tonnes. Outre que cette activité a permis à l’orpaillage clandestin de se développer outrageusement sur Saül, il faudra aussi prendre en compte, entre autres, tous les dégâts collatéraux, y compris la prolifération du paludisme qui pèse lourdement sur les populations (elle explose sur Saül), les finances des collectivités, et ruine pour longtemps le tourisme dans cette partie de la Guyane, reconnue comme un joyau du département. Toutes les armées du monde ne règleront pas le problème de l’orpaillage clandestin en Guyane tant que la justice ne mettra pas systématiquement son nez dans les petits et gros trafics qui permettent son développement. Avec les moyens nécessaires, que nous attendons encore.

Ce n’est pourtant pas faute de les avoir demandés, et l’ancien procureur Claire Lanet a été de ce point de vue exemplaire, demandant sans relâche des moyens pour accomplir l'indispensable et lourde tâche. Mais elle est partie sans avoir obtenu satisfaction.

Et les véritables tortionnaires de la Guyane courent toujours…

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