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Jodla 25/05/06
Peut-on encore y croire ?

La réalité démocratique de la Guyane, c’est d’abord celle-ci, qu’on ne s’y trompe pas : environ 58 000 électeurs inscrits, dont à peine la moitié se déplace pour aller voter, et même plus souvent un quart seulement. Le rêve du Guyanais moyen est d’avoir un emploi dans la fonction publique ou les collectivités territoriales. Dans le même temps, tout entrepreneur est regardé comme un exploiteur potentiel puisque la Guyane s’affiche à gauche tout en étant résolument conservatrice et réactionnaire dans ses choix, réinstallant éternellement des élites cyniques et sectaires.

Certains ne voient l’avenir de la Guyane qu’à travers un changement de statut, mais n’ont pas pour autant le courage d’opter pour une mini-réforme quand l’occasion leur est donnée (l’article 74 en est un exemple). Et en guise de motivation pour avancer, on nous sert chaque jour un nouveau concert de lamentations. On pourrait multiplier les exemples à l'infini. Comment s’étonner après qu’on nous néglige, qu’on nous traite comme un confetti de la République ? Qu’avons-nous fait pour mériter mieux ?

Mais ce pays est un cadeau des dieux, et le dernier endroit, peut-être même le seul, qui soit encore vivable au monde, beau comme un astre, vert comme un paradis. Avec une jeunesse invraisemblable, faite de toutes les splendeurs et de toutes les misères de l’immigration, qui est en train de construire une autre culture, un avenir qui va vous échapper, vous les vieux croûtons de la politique, vieux avant l’âge, repliés sur des réflexes identitaires, incapables de réagir, usés par des années de discours creux. Vous n’avez pourtant pas fait grand-chose pour l’éduquer, cette jeunesse ! (Vous êtes-vous jamais demandé pourquoi tant de jeunes - la véritable élite de ce pays - ne reviennent plus une fois formés ?)  Alors, comment voulez-vous que la France, celle qui est à 8000 kilomètres, nous entende si vous ne dites rien ? D’autant qu’elle a les oreilles bouchées ! Où sont vos obscurs intérêts pour que vous taisiez l’essentiel alors que le pays est en danger ?

Mais peut-être n’avez-vous pas encore compris que l’immense privilège de la Guyane, c’est sa nature incomparable, qui seule pourra permettre aux hommes de demain d’être, tout simplement, heureux. Mais en avez-vous vraiment quelque chose à faire des hommes de demain ?

Ce silence insupportable - une semaine après le drame - de la classe politique, locale et nationale, sur le meurtre de deux hommes – un Brésilien et un Surinamien, me direz-vous – au service d’une des plus belles missions de la République, est inscrit définitivement dans nos mémoires. C’est sur ce silence qu’il nous faudra désormais construire.

Alors, remettons les compteurs à zéro, et en avant !

Blada
odile@blada.com

mai 2006

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