Pendant que le petit monde du littoral se contemple inlassablement le nombril, oubliant volontiers l'irréparable drame qui se joue à l'intérieur du pays, les massacres continuent, et les militants essaient de se faire entendre par des autorités autistes. A l'Urania mardi 8 avril sera projeté pour la première fois au cinéma en Guyane*, le film de Daniel Schweizer tourné en 2008 sur le Maroni : Dirty paradise. La projection doit être suivie d'une conférence pour faire le point des dégâts et des engagements de l'Etat.
L'orpaillage clandestin, la surpêche et la surchasse sont des phénomènes intimement liés, auxquels il faut ajouter sans hésiter l'insécurité, à travers des armes extrêmement dangereuses détenues sans permis et sans surveillance. Les drames sont aussi nombreux que tragiques, et les autorités semblent en prendre timidement conscience avec l'opération en cours "Déposez les armes". Mais les difficultés sont immenses, car il ne suffira pas de voter des lois, il faudra aussi se donner les moyens de les faire appliquer.
Aujourd'hui deux associations guyanaises, Maiouri Nature Guyane et la Compagnie des Guides de Guyane, avec le soutien de Humanité et Biodiversité, alertent les autorités sur la raréfaction de la faune et présentent un « projet de loi chasse et pêche pour la Guyane » (pdf 1,5 mo) : « la législation de la faune sauvage ne sont plus en adéquation avec les enjeux sociaux, environnementaux et économiques du département.»
« Du point de vue environnemental, le littoral guyanais s’est vidé en quelques années des espèces gibiers les plus prisées : tapir, cochon bwa, hocco… La chasse de loisir raisonnée ou vivrière, a laissé la place à une chasse commerciale. Les acteurs de ces trafics sont équipés de moyen de locomotion et de conservation qui permettent des tableaux de chasse abusifs. Cette situation délétère se trouve confortée par une réglementation laxiste, ne serait-ce qu’au regard de celle de nos pays voisins. Les effectifs de la garderie en place sont insuffisants pour contrôler un si grand territoire.
« Du point de vue économique, les opérateurs touristiques, assistent, impuissants à la destruction de cette ressource naturelle, un bien commun, dont ils disposent respectueusement et durablement. La cohabitation avec les chasseurs tout-puissants sur les fleuves et les pistes forestières, génère, qui plus est, un climat d'insécurité (voire la mise en danger) qui ne favorise pas le retour de la clientèle.
« Enfin, du point de vue de la sécurité, l’absence de règlementation des armes de chasse amplifie le climat d’insécurité déjà flagrants en Guyane. La possibilité pour tout un chacun de détenir sans permis une arme de chasse explique malheureusement les drames humains inacceptables liés à leurs usages incontrôlés. La médiatisation des derniers arrêtés limitant les abus de la chasse ou améliorant la sécurité des citoyens (tirs interdits près des habitations), a été quasi inexistante depuis 2007.»
Lire aussi sur Guyaweb : Les opposants à la chasse libre sonnent la fin de la récré.
En 2005 déjà, Pierre-Michel Forget donnait l'alerte en ces termes : « Qu’est-ce qu’on attend en France pour prendre exemple sur notre proche voisin, un précurseur en matière de conservation de la forêt tropicale ? Il ne faudrait pas attendre que les espèces disparaissent pour s’occuper de leur protection et de leur conservation.» : S'alimenter en Amazonie française : la grande loterie.
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* A la suite de la parution de cet article, le cinéma Le Toucan de Saint-Laurent du Maroni nous a adressé le rectificatif qui suit. Si Dirty Paradise n'a jamais été programmé au cinéma en Guyane, il y a été projeté plusieurs fois dans le cadre d'initiatives associatives :
« Contrairement à ce que vous affirmez dans votre Jodla du 6/04, Dirty Paradise a déjà été projeté plusieurs fois en Guyane, la dernière fois lors du dernier festival America Molo Man consacré aux Terres amérindiennes. Il fut suivit d'un débat passionnant avec des témoignages d'amérindiens comme celui d'Alexis Tiouka. Il a aussi été diffusé lors de la première édition de La toile des palmistes organisée par la G-CAM, et plusieurs fois dans les quartiers à saint-Laurent du Maroni.»
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