aller au menu  |  aller au contenu

connexion  |  inscription

Les Quatre plaies de l’Afrique
selon Barack Obama

par Lawoetey-Pierre AJAVON


Lawoetey-Pierre AJAVON est enseignant-chercheur en Histoire et en Anthropologie, Docteur Troisième Cycle en Ethnologie, et Docteur d'Etat en Anthropologie des Sociétés Orales. Spécialiste des transformations et traditions culturelles africaines ainsi que de l'histoire de l'esclavage en Afrique, il a publié : « Esclavage et Traite des Noirs : quelle responsabilité africaine » (Editions Menaibuc, Paris, 2006). Il s'apprête à publier prochainement un ouvrage sur « Le rôle des religions africaines dans la libération des Esclaves ».
Lawoetey-Pierre AJAVON  est actuellement professeur d'histoire au Lycée de Mahina et chargé de cours à l'Université de la Polynésie Française.

Deux ans, presque jour pour jour, après le discours très controversé du président Nicolas Sarkozy à Dakar le 22 juillet 2007, le président américain Barack Obama, pour sa première visite officielle en Afrique subsaharienne, s’est livré à un exercice courageux dans un discours considéré déjà comme « historique », le 11 juillet 2009 devant le Parlement ghanéen à Accra (capitale du Ghana). D’aucuns ont tenté de déceler une similitude entre le discours du président français et celui du président américain, allant jusqu’à accuser les Africains de surfer sur une vague affective, acceptant d’Obama ce qu’ils refusaient à Sarkozy au Sénégal. Mais, ne nous méprenons pas. Si effectivement le constat des deux chefs de l’Etat est sensiblement le même sur le fond, leurs approches sont diamétralement opposées. J’avais moi-même, à l’époque, dans une lettre ouverte au président français, relevé les erreurs de jugement et de méthode dans son discours dakarois. Nous y reviendrons.

Il faut d’abord dire que le choix du Ghana aux dépens du Nigéria, géant économique et démographique, n’était pas un hasard du calendrier du couple Obama.

En effet, l’ancienne colonie britannique la Gold Coast Côte de l’Or), devenue le Ghana après une émancipation politique plus ou moins pacifique en 1957, sous la houlette de son premier président « l’osagwefo » (rédempteur en langue ashanti) Kwame N’krumah, initiateur du Panafricanisme, et surtout ardent partisan de l’Unité Africaine, entra comme bon nombre de pays de la sous-région dans le cycle infernal des coups d’Etat militaires avant de connaître à nouveau une stabilité politique et une croissance économique continue au milieu des années 80.

C’est donc ce pays stable, où l’alternance politique est devenue l’exception démocratique qui infirme la règle en Afrique Noire, qu’Obama a choisi de visiter. Tout un symbole. Mais surtout une leçon aux autres ploutocraties et autocraties du continent. Aussi, depuis la tribune du parlement du pays du président John Atta Mills, c’est à toute l’Afrique que le président américain entend s’adresser.

Au-delà du symbole ghanéen, quel message le président Obama a-t-il voulu transmettre à l’Afrique ? Se voulant à la fois un diagnostic sans complaisance des maux qui minent ce continent et un espoir dans son avenir, le vigoureux discours d’Obama s’est décliné en quatre thèmes essentiels : la démocratie, les possibilités économiques, la santé et le règlement pacifique des conflits. En somme les problèmes omnipotents de l’Afrique contemporaine.

En abordant en premier lieu le thème de la démocratie, le président américain et ses conseillers avaient sans doute en tête les prochaines échéances électorales qui vont se dérouler d’ici 2011 dans plusieurs pays africains. Son message sonne déjà comme une mise en garde et une dénonciation des autocraties qui se maintiennent au pouvoir ou qui seraient tentés de s’y maintenir, contre la volonté de leurs peuples, soit par la coercition et la corruption, soit par le trucage des élections et l’achat des consciences, soit enfin par la modification autoritaire des constitutions : Togo, Niger, Gabon, Côte d’Ivoire, Zimbabwé, Madagascar, Cameroun pour ne citer que ceux-là.

Malheureusement, les exemples sont légion, du Nord au Sud, d’Est en Ouest du continent africain, où des régimes dynastiques, prédateurs, corrompus, claniques et génocidaires, confisquant le pouvoir politique, finissent par abandonner leurs peuples dans la paupérisation de plus en plus croissante et la misère la plus éhontée.

Ironie du sort, au moment où Obama foulait le sol ghanéen, un des parrains de la françafrique, l’inamovible Denis Sassou N’guesso du Congo, connu pour son goût immodéré pour le siphonage des ressources pétrolières de son pays aux fins d’acquisition d’immeubles de luxe à l’étranger (voir le procès intenté contre lui en France par plusieurs associations, pour enrichissement illicite), déclarait avoir remporté la dernière élection présidentielle. Une victoire à la soviétique que le président Sarkozy s’est empressé de saluer.

Certes, Obama dans ses propos s’était contenté de généralités, se gardant, à l’exception du Soudan, du Zimbabwe et du Kenya, de nommer explicitement tous les pays africains en déficit démocratique. Mais les peuples africains, eux, avaient sûrement, ce 11 juillet à 9 heures (heure du Ghana), au moment où le président américain s’exprimait devant les parlementaires ghanéens, tous leurs regards tournés vers les palais présidentiels et autres bunkers sanctuarisés de leurs dictateurs. Surtout lorsque Obama place ces derniers devant le verdict de l’histoire, non sans les avoir directement interpellés dans des termes peu diplomatiques : « les gouvernements qui respectent la volonté de leur peuple, qui gouvernent par le consentement et non par la coercition, sont plus prospères, plus stables et plus florissants que ceux qui ne le font pas. Il ne s’agit pas seulement d’organiser les élections - il faut voir ce qui se passe entre les scrutins. La répression revêt de nombreuses formes et trop de pays, même ceux qui tiennent les élections sont en proie à des problèmes qui condamnent leur peuple à la pauvreté. Aucun pays ne peut créer des richesses si ses dirigeants exploitent l’économie pour s’enrichir personnellement (…) Personne ne veut vivre dans une société où la règle de droit cède la place à la loi du plus fort et à la corruption .Ce n’est pas la démocratie, c’est de la tyrannie, même si de temps en temps on y sème une élection ça et là, il est temps que ce style de gouvernement disparaisse… L’histoire est du côté de ces courageux Africains, et non dans le camp de ceux qui se servent des coups d’Etat ou qui modifient les constitutions pour rester au pouvoir. L’Afrique n’a pas besoin d’hommes forts, mais de fortes institutions ».

Dans la même logique, pour le président américain, la croissance économique et la création de richesses sur le continent ne pourraient qu’être assujetties à la « bonne gouvernance », préalable à tout progrès économique.

Sous forme de recommandations, le « professeur » Obama s’essayera à un habile cours d’économie politique ponctué de critiques feutrées à l’égard des pays africains n’ayant aucune vision prospective en matière de développement économique, en leur conseillant in fine, de « rompre avec les vieilles habitudes ».

A ceux qui ne se satisfont que de l’aide étrangère, ou sont habitués à tendre perpétuellement la main, le verdict du président américain sera sans appel : « l’aide n’est pas une fin en soi. L’objectif de l’aide à l’étranger doit être de créer les conditions dans lesquelles elle ne sera plus nécessaire. ».

Reconnaissant ensuite les énormes progrès accomplis par quelques pays africains (Ghana et Nigéria) dans le domaine sanitaire, en particulier dans la lutte contre la pandémie du VIH/Sida, le chef de la Maison Blanche a observé néanmoins que « trop d’Africains périssent toujours de maladies qui ne devraient pas les tuer. Lorsque des enfants meurent d’une piqûre de moustique et que des mères succombent lors d’un accouchement, nous savons qu’il reste des progrès à faire ».

Abordant enfin l’un des drames les plus médiatisés du continent noir, les guerres civiles et les conflits tribaux, avec leurs corollaires : viol des femmes, enrôlement des enfants-soldats, terrorisme d’Etat…, Barack Obama n’a pas ménagé ses critiques à l’égard des dirigeants qui encouragent l’intolérance religieuse et ethnique. Même s’il reconnaît que « l’Afrique ne correspond pas à la caricature grossière d’un continent perpétuellement en guerre », il relève dans le même temps que : « si l’on est honnête, pour beaucoup d’Africains, le conflit fait partie de la vie ; il est », dit-il « aussi constant que le soleil… ».

Enfin, force est de reconnaître que c’est une magistrale leçon de morale politique qu’Obama a donné à des pairs africains. Puisse cela inspirer les nombreux saigneurs des guerres tribales, du Congo à la Somalie, en passant par la Côte d’Ivoire, le Libéria, la Sierra-Léone… Les réalités ethniques ou tribales en Afrique, au lieu de se définir en termes d’opposition aux autres, devraient être une source de force et non de division a ajouté le chef de la Maison Blanche.


Quels enseignements tirer du discours d’Obama ?

Il ne serait pas exagéré d’affirmer que le discours d’Obama se donne à interpréter comme un viatique, sinon, comme un véritable acte fondateur pour l’Afrique du XXIème siècle. Au-delà de l’implacable constat, il s’apparente à un vaste bilan de santé politique et économique où sont passés au crible tous les sujets brûlants : les institutions démocratiques, les élections, la bonne gouvernance, la corruption, le tribalisme, les conflits ethniques et religieux, la colonisation l’aide internationale, la santé, l’agriculture, l’environnement, etc.

D’une manière pertinente et rationnelle, et sans émotion particulière, il a mis les Africains et leurs dirigeants devant leurs responsabilités. Après avoir diagnostiqué en quatre points, et sans tabou, les causes et les symptômes des principaux maux du continent, il préconisera ses remèdes pour en sortir. Peu habitués à entendre un tel discours, et souvent ménagés ou caressés dans le sens du poil par leurs pairs occidentaux dont ils sont pour la plupart redevables pour leur accession ou maintien au pouvoir, les dictateurs africains en ont eu pour leurs frais.

Mais, qui mieux que Barack Obama pouvait parler ce langage de vérité à ses « frères » Africains ? « J’ai du sang africain dans mes veines », a-t-il affirmé. C’est aussi cette connivence avec le continent noir qui lui permet incontestablement de saisir mieux que les autres chefs d’Etat américains, la complexité africaine et de surcroît, d’être mieux entendu, malgré ses propos dérangeants. Et s’il a opportunément rappelé l’histoire de sa propre famille paternelle humiliée sous le régime colonial mais également victime du népotisme et du tribalisme après l’indépendance kényane, c’est pour mieux inviter les Africains à regarder vers l’avenir, à se débarrasser des séquelles du passé, et à poser les bases d’un réel développement. Mais pour ce faire, l’Afrique ne peut faire l’économie de la bonne gouvernance, de la saine gestion de ses ressources dont les bénéfices doivent profiter aux peuples, au lieu d’être captés par les pouvoirs kleptomanes en place.

L’Afrique est riche de ses potentialités naturelles, intellectuelles, et humaines ; mais, hormis l’infime minorité de prédateurs qui tient les rennes du pouvoir, les Africains dans leur grande majorité sont pauvres, semble nous dire Obama.

L’originalité ici est que, loin de camper sur une position afro-pessimiste à laquelle d’autres nous ont habitués, les propos d’Obama reflètent sa foi et sa confiance en l’avenir de l’Afrique. Aussi, prenant acte des progrès réalisés par certains pays africains dans les domaines de la démocratie, de la croissance économique, de la santé publique - même s’il reconnaît que beaucoup reste à faire -, il a parlé de l’Afrique qui marche, et de la capacité des Africains à projeter leurs innovations dans le futur. En témoigne, dit-il, « le succès extraordinaire d’Africains dans mon propre pays, l’Amérique. Ils se portent bien. Ils ont donc le talent et ils possèdent l’esprit d’entreprise - la question est donc de savoir comment s’assurer qu’ils réussissent ici dans leur pays d’origine (…). Et que ce soient des chefs d’entreprises spécialisées dans la téléphonie portable ou de petits agriculteurs, les Africains ont montré leur capacité et leur volonté de créer leurs propres possibilités… »

Comme on peut le constater, sans nier l’évidence de ses problèmes, Obama a choisi de parler de l’Afrique de la modernité et d’encourager ceux d’entre eux qui gagnent, ou qui font des progrès dans la voie démocratique et l’instauration de l’Etat de droit, tout en leur promettant l’aide et le soutien des Etats-Unis : « ce que fera l’Amérique, en revanche, ce sera d’accroître son aide aux personnes et aux institutions responsables, en mettant l’accent sur l’appui à la bonne gouvernance : aux parlements qui maîtrisent les abus de pouvoir et s’assurent que les voix de l’opposition peuvent s’exprimer… ».

On aurait aimé entendre les mêmes propos de la part du président Sarkozy à Dakar il y deux ans. Si le Français et l’Américain se sont effectivement adressés tous les deux à la jeunesse africaine, et s’ils ont à peu près développé les mêmes thématiques, on relèvera une différence d’approche et de style dans les deux discours.

D’abord, un constat : pendant qu’Obama choisit de visiter le Ghana, pays cité comme modèle d’alternance politique réussie, et qu’il exhortait les parlementaires ghanéens à renforcer l’Etat de droit et la bonne gouvernance, Nicolas Sarkozy n’a trouvé mieux que d’adresser ses félicitations à Sassou N’guesso, président mal élu du Congo, et a fortiori, adepte de la corruption à grande échelle. Un mois plus tôt, par sa présence effective aux obsèques du « doyen » de la françafrique, le gabonais Omar Bongo, qui entretint durant quatre décennies des relations sadomasochistes avec l’ancienne puissance coloniale, le président français signifiait par là que la « rupture » dont il fit son cheval de bataille pendant l’élection présidentielle n’est plus à l’ordre du jour. Du moins pour les Africains. Et ce n’est pas l’ex-ministre de la coopération Jean-Marie Bockel, qui l’a appris à ses dépens, qui nous démentira.

Ensuite, quand Obama nous parle de projet, de l’avenir de l’Afrique, continent résolument ancré au monde en mutation en affirmant : « je ne considère pas l’Afrique et les peuples d’Afrique comme un monde à part ; je considère l’Afrique comme une partie fondamentale de notre monde interconnecté, comme un partenaire des Etats-Unis en faveur de l’avenir que nous souhaitons pour tous nos enfants », Sarkozy lui, considère que : « l’homme africain n’était pas assez entré dans l’histoire… », en choisissant ainsi de recycler entre autres, les thèses éculées et raciales des anthropologues du XIX siècle, dont particulièrement, celles du philosophe allemand Hegel qui déclarait que l’Afrique n’était pas une partie historique du monde, car n’ayant pas de mouvements.

Par ailleurs, là où Obama avait su habilement utiliser l’art de la nuance, tout en restant ferme sur ses positions, Sarkozy s’était délibérément drapé du manteau du donneur de leçons, s’enfermant dans une rhétorique professorale qui frisait la condescendance, voire l’affrontement : « Le problème de l’Afrique, c’est que… », avait-il répété près de huit fois dans son discours.

Ce discours de Dakar a fait récemment l’objet de plusieurs articles et ouvrages critiques pour qu’il soit encore nécessaire de s’y étendre.

Mais, pour autant, faut-il applaudir des deux mains au discours de Barack Obama qui fait consensus dans tous les milieux politiques et au sein des sociétés civiles africaines ? Car, en dehors de Nelson Mandéla , jamais homme politique noir n’a autant été adulé, porté aux nues, ou suscité autant de fierté, d’admiration et d’espoir sur le continent noir. Au lendemain de la victoire de l’Africain-Américain, j’avais tenté dans un de mes articles «  La victoire de Barack Obama et la question identitaire » de comprendre les causes de ce phénomène de « projection-identification » dont bénéficie le premier président « noir » du plus puissant Etat de la planète, auprès des Africains et de leurs diasporas aux quatre coins du monde.

Je me permettrai de réitérer ici un des points essentiels que j’avais développés dans mon article cité en référence : Obama n’est pas Africain ; il n’est pas élu pour faire le bonheur des habitants du continent noir, mais de celui de ses compatriotes Américains. A ce titre, les intérêts égoïstes de l’Amérique passeront avant toute chose.

A ce propos, on aura remarqué le silence coupable d’Obama, quant au rôle de l’Amérique-  puisqu’il s’exprime au nom de son pays -, dans le soutien à certaines dictatures et à de nombreux groupuscules sanguinaires en Afrique dans les années 80. Quid du l’appui au défunt satrape zaïrois, Joseph Désiré Mobutu, ex-agent patenté de la CIA et de la Belgique, et cheval de Troie de l’Occident en Afrique centrale et australe ? Quid de l’aide des USA à la rébellion dévastatrice, l’Unita, de Jonas Savimbi contre le gouvernement central ? Conséquences : l’Angola est à côté du Cambodge le pays qui compte le plus de victimes des mines anti-personnelles, dont des centaines de milliers d’enfants-soldats enrôlés de force dans l’armée de Savimbi. Sans parler du viol des milliers de femmes par les milices droguées. Quid enfin de l’engagement politique, économique et militaire de l’Amérique de Ronald Reagan auprès du régime raciste et fasciste de l’apartheid ? Obama peut-il passer tous ces événements par pertes et profits ? On nous rétorquera que c’était la Guerre Froide, et que l’enjeu était avant tout de barrer la route au communisme en Afrique. Qu’on aille donc raconter cela aux victimes traumatisées à vie.

Obama aura beau jeu de stigmatiser des guerres civiles et le sort des enfants-soldats en Somalie et au Darfour. Mais il eût été plus décent d’avoir une pensée toute particulière pour ces centaines de milliers de veufs, veuves, orphelins et handicapés, victimes des milices et des rébellions soutenues, conseillées et armées par le pays de L’Oncle Sam pendant plus de deux décennies. L’histoire nous dira également un jour, pourquoi les USA, pourtant bien informés sur les intentions des génocidaires rwandais du « Palipe- Hutu », ont longtemps réfuté le terme « génocide » qui aurait obligé la communauté internationale à intervenir en application des conventions de l’ONU. On connaît la suite : le départ précipité et honteux des forces de la Minuar, laissant les 800 000 (peut-être un peu plus) Tutsis aux mains des adeptes de la machette.

Les conseillers du chef de la Maison Blanche ont sans doute omis de lui rappeler également qu’au plus fort de la guerre civile du Libéria, pendant que les chefs de guerre mettaient leur pays à feu et à sang - près de dix années - pour la conservation du monopole de l’or et du diamant, la compagnie américaine « Firestone Rubber » (premier fournisseur de pneus de voiture), faisait travailler, à l’abri des regards indiscrets, de jeunes enfants dans les plantations d’hévéa, principale ressource de ce petit pays ouest-africain aujourd’hui exsangue, et dont les populations villageoises subissent encore les effets nocifs de la pollution de l’eau, due aux rejets de déchets toxiques provenant des installations de cette compagnie industrielle.

Barack Obama entendra-t-il enfin le cri d’alarme des producteurs africains de coton qui, soutenus par l’Organisation Mondiale du Commerce, dénoncent depuis une dizaine d’années les subventions américaines à leurs propres paysans, menaçant ainsi quotidiennement les maigres moyens de subsistance des Africains qui ont du mal à tenir la concurrence mondiale ?
Le président américain, si soucieux du développement économique de l’Afrique tel qu’exprimé dans son discours, consentira-t-il enfin à faire desserrer l’étau du F.M.I et de la Banque Mondiale - institutions que contrôlent d’ailleurs jalousement les Etats-Unis -, sur les économies moribondes des pays africains victimes des plans d’ajustement structurel à vocation ultralibérale et aux conséquences sociales de plus en plus dramatiques ?

Pour terminer, espérons qu’au-delà du discours et des diatribes, fort du crédit et de l’espoir placés en lui dans le monde, et plus singulièrement en Afrique, Obama saura traduire en actes le volontarisme manifesté à Accra. Espérons aussi que sa visite au Ghana, si symbolique fût-elle, ne sera pas le prétexte pour pré-positionner les Etats-Unis dans la course effrénée que se livrent aujourd’hui l’Occident et la Chine, en quête des matières premières du continent africain. Rappelons ici que le Ghana, deuxième producteur mondial de cacao, dispose également d’importantes potentialités en or, diamant et pétrole, dont une réserve de 600 millions de barils de pétrole découverte en 2007 et qui intéresse tout particulièrement la compagnie américaine, la « Gold Star Resources ». Espérons enfin que cette visite présidentielle américaine ne rentre pas uniquement dans la stratégie énergétique des USA qui visent, d’ici l’an 2020, l’importation annuelle de 770 millions de barils du pétrole de la Côte d’Ivoire, du Libéria, et du Ghana.

Le Général de Gaulle disait que les nations n’ont pas d’amis, mais des intérêts. Si l’Amérique sait où se trouvent ses intérêts, aux Africains de savoir également où se trouvent les leurs. L’Afrique a vu défiler bon nombre de dirigeants étrangers qui nous ont tenu presque le même discours. Mais ayons le courage et l’honnêteté d’avouer qu’après quarante années d’émancipation (?) politique, nous avons collectivement échoué.

La question fondamentale aujourd’hui, est de savoir si nous sommes capables de prendre nos responsabilités face à l’avenir et donc, à l’histoire. Obama nous a avertis : « Ce ne sera pas facile. Cela exigera du temps et des efforts. Il y aura des souffrances et des revers… » ; si nous sommes capables de relever les grands défis d’un monde inique et cynique, mais malgré tout en mutation, et duquel nous sommes de plus en plus les grands absents ; si nous sommes capables de démentir ces épisodiques et insoutenables images de guerres, de famine, de coups d’Etats, de maladies endémiques et autres, véhiculées par les médias du monde entier, et qui semblent nous coller de manière rédhibitoire à la peau.

Le regretté professeur d’histoire Burkinabè, Joseph Ki-Zerbo, dans son livre-entretien, « A quand l’Afrique ? » (prix RFI-témoin du monde, 2003) disait : « si nous sommes couchés, nous sommes morts ». Et cela, les générations futures ne seront pas prêtes à nous le pardonner.


Lawoetey-Pierre AJAVON

lawoetey@voila.fr


Août 2009



Du même auteur, sur blada.com


Juin 2009 : Les propos du pape Benoît XVI en Afrique sur l'utilisation du préservatif
Janvier 2009 : La Victoire de Barack Obama et la problématique identitaire

Avril 2008 : La Dette de l'Afrique envers Aimé Césaire
Septembre 2007 : La Question africaine

 

 

 


Autres chroniques de l'année 2009

Raccourcis  




passer une petite annonce



passer une annonce de covoiturage





passer une annonce d’emploi












associations, postez vos actualités


participez au courrier des lecteurs

La Guyane c’est ici 

La qualité de l’Air avec
ATMO


 

Photothèque

Lancements 2022
Lancements 2022
Vol 259 Ariane 5

Annonceurs

Régie publicitaire