aller au menu  |  aller au contenu

connexion  |  inscription

Saül, si loin et si proche. 
Une commune d’avenir pour le développement touristique

par Julien Demenois et Christophe Proisy

A l’heure de la continuité territoriale et du désenclavement de l’intérieur de la Guyane (route vers Apatou et nombreux autres projets), qui n’a pas rêvé de relier Cayenne à Saül en 325 km de route ? Dans l’imaginaire de nombre de Guyanais, ce tracé historique de la piste de Bélizon a fait naître et fait naître encore des sentiments contrastés mêlant à la fois des images de ruée vers l’or et de forêt impénétrable, en tout cas une attirance presque mythique.

Un peu d’histoire… 
Auparavant parcourues par les Indiens Emérillons, les régions du Haut Approuague et de Saül ont été à la fin du XIXème siècle l’objet d’une véritable ruée vers l’or. Entre 1910 et 1930, la population d’orpailleurs croît fortement dans cette région. De nombreux émigrés des îles antillaises de Sainte Lucie et de la Dominique viennent tenter leur chance dans l’or. Le village de Saül naît ainsi en 1910 suite à l’installation d’un émigré saint Lucien, du nom de Sahul, sur le site de l’actuel village. Dès lors, des projets de désenclavement de Saül vont fleurir afin de rendre l’or plus accessible. En 1916, le Capitaine Refroigney conçoit un projet de chemin de fer censé relier la rivière Comté au placer Souvenir proche de Saül. Ce projet sera repris en 1920 par Galmot, mais ne verra jamais le jour. Il faudra alors attendre le début des années 1950 pour s’affranchir partiellement des fleuves.

En 1952, la piste de Bélizon à Saül (150 km) est ouverte par le Bureau Minier Guyanais (organisme dont est issu l’actuel BRGM) dans le but d’évaluer la richesse des nombreux gîtes aurifères repérés dans cette région. Les espoirs miniers de la zone s’éteindront cependant rapidement. L’épuisement des gisements les plus faciles et fertiles combiné à la chute du prix de l’or eurent raison des coûts d’entretien exorbitants de la piste. Dès les années 1960, elle était laissée à l’abandon. Aujourd’hui, sa trace n’est plus parcourue que très occasionnellement par des randonneurs, et peut-être plus fréquemment par des orpailleurs à pied ou à pelleteuse.

Saül, le cœur de la Guyane
Saül, c’est loin vu de Cayenne et seul l’avion peut nous y amener. De ça, les habitants s’en souviennent bien, eux qui ont été cloîtrés pendant de long mois quand les avions d’Air Guyane ne s’y posaient plus. Pourtant, Saül c’est aussi et surtout le cœur de la Guyane et pas simplement géographiquement parlant. Comme le dit Monsieur Agasso, Maripasoula c’est à quelques coups de pagaie de la crique Limonade ; quand on est à Carbet Maïs, Régina n’est plus très loin en descendant l’Approuague ; et Mana n’est pas à plus de 20 km à pieds. Pour Cayenne, et bien c’est toujours tout droit à partir des Eaux Claires.

Et si finalement l’isolement de Saül n’était pas son atout principal, ce qui fait que ses habitants y sont si accueillants, que la commune est toujours immaculée de déchets, contrairement à beaucoup d’autres communes de Guyane ?

Alors rien que pour cela, Saül mérite une mention spéciale. De plus, le réseau des sentiers pédestres aménagés fait de Saül un lieu unique pour le touriste, de Guyane ou d’ailleurs, qui souhaite s’évader à la journée et découvrir des ambiances forestières variées. Du circuit de Roche Bateau à celui des Monts la Fumée, les atmosphères que l’on peut apprécier sont diverses : crique limpide, blocs rocheux pour l’un ; points de vue sur la forêt, brise dans les arbres, fraîcheur du brouillard pour l’autre. Le soir, les randonneurs se retrouvent chez Mélanie, chez Daï , chez Annette, … partagent leurs récits de la journée, rêvent à de nouvelles promenades qu’ils pourront faire la prochaine fois vers le Mont Galbao, vers Carbet Maïs, ou pourquoi pas vers le Pic Matecho.

Et puis, il y a ceux qui viennent à Saül pour découvrir la région différemment qu’à pied. Ces doux rêveurs, visiblement à Saül on les apprécie, sans doute parce que le village est aussi né d’un rêve. Canots gonflables pour les uns afin de descendre l’Approuague, l’Inini ou bien encore la Mana. Quads pour d’autres en provenance de Bélizon. Anes également, à la manière de Stevenson. Voire VTT, comme c’était notre cas cette semaine du 11 novembre 2004.

Témoignage en VTT entre Saül et Cayenne
En voulant rejoindre Saül à Cayenne en VTT, nous avons voulu en quelque sorte prendre le " pouls " d’un petit morceau de la Guyane. En une semaine de randonnée VTT, nous avons pu nous rendre compte que les a priori que l’on pouvait avoir sur ce parcours ne tenaient pas.

Tout d’abord, cette partie de forêt de Saül à Bélizon n’est pas un " no man’s land " où les orpailleurs clandestins se cachent derrière chaque arbre. L’ensemble des criques qui se situent sur le parcours sont propres. Leurs eaux sont claires et bien rafraîchissantes. Il y a donc encore de l’espoir : la Guyane n’est pas encore complètement souillée par l’orpaillage clandestin, même si dans d’autres coins ... Finalement, c’est en arrivant sur les " têtes " de la Comté, en traversant la crique Mazin, que l’on voit les traces les plus tangibles d’orpaillage : une eau turbide et blanchâtre. Autre trace bien tangible toutefois, une pelleteuse empruntant la piste en direction de la Haute Mana pour travailler dans un site légal.

Sur le parcours ensuite, la faune ne semble guère effrayée par les hommes, en particulier les hoccos, certains se plaisant même à nous ouvrir la voie pendant quelques dizaines de mètres. Toutefois, cette faune est restée bien discrète, concentrés que nous étions à ne pas casser notre matériel. Finalement, seules les nombreuses empreintes de félin laissées dans la boue attestaient du caractère " vierge " du secteur.

La piste ensuite, même si elle à plus de 50 ans, laisse encore entrevoir des restes de ponts et de plate-forme, signes qu’elle n’est pas une légende. En revanche, même si son tracé suit le relief, elle n’en reste pas moins très vallonnée. Enfin, une bonne partie, entre les " têtes " de la Comté et l’actuelle piste forestière de Bélizon reste difficilement praticable. Ce n’est qu’un vaste bourbier de bas fonds créé par les pelleteuses et autres engins qui passent dans le secteur avec qui plus est des pentes dont le pourcentage est à frémir. Mais pourquoi pas une tentative en 4x4 pour relier Saül ?! Elle n’aurait rien à envier certaines autres courses ou trophées automobiles.

Une route vers Saül. Pour qui ? Pourquoi ? 
Autant dire que réhabiliter cette piste jusqu’à Saül pose plusieurs questions. La première question étant : pour qui et pourquoi faire cela ? Les habitants de Saül attendent-ils après ? Imagine-t-on l’impact que cela aura sur cette partie de forêt entre Bélizon et Saül, aujourd’hui remarquablement préservée ? Ne verra-t-on pas une vague d’orpailleurs retravailler les anciens placers qui jalonnent le tracé de l’ancienne piste de Bélizon à Saül ?

A l’aube du Parc du Sud, intégrant, espérons le, Saül comme porte d’entrée, l’avenir de la commune ne semble pas reposer sur la réhabilitation de cette route.

De plus, ce sont près de 200 km de piste en forêt qu’il faudra régulièrement entretenir, sous peine de subir un isolement bien plus pérenne que celui vécut à l’époque de la grève d’Air Guyane, surtout si cette dernière compagnie vient à ne plus desservir la commune, comme cela pourrait arriver à Saint Georges suite à l’ouverture de la RN 3. Quelle collectivité est financièrement prête à assumer cela ? Alors réfléchissons bien avant d’annoncer le désenclavement par la route partout et pour tout le monde en Guyane.

Un avenir radieux pour Saül ? 
Bien au contraire, il nous semble que l’avenir de Saül passe bien par le maintien de cet isolement actuel. C’est ce qui attire les touristes et les nouveaux habitants du village. Cependant, cet isolement doit rester vivable par les habitants. Aussi, la pérennisation d’une liaison aérienne devrait constituer une priorité des pouvoirs publics. Quoi de plus agréable que de survoler cette immense forêt, de passer à côté du Pic Matecho aux parois rocheuses, avant de plonger vers l’écrin que constitue Saül ?

Et pourquoi pas faire de la future (ex ?) boulangerie de Saül un lieu de rencontres ? Certes, dans un premier temps il s’agirait de trouver un boulanger, puisque cette question n’a pas été résolue avant même de poser la première brique… On imaginerait pourtant bien faire de ce lieu un cyber café, finissant de relier Saül, la capitale de la Guyane, au reste du monde.

Bref, gageons que la création du Parc du Sud saura faire de Saül le " Chamonix de Guyane ", attirant autant les amoureux de la nature que les passionnés de rencontres humaines ou d’histoires.

Julien Demenois et Christophe Proisy

Novembre 2004


Pour en savoir plus sur la randonnée en VTT de Saül à Cayenne, rendez-vous sur internet : http://cproisy.free.fr  et suivez le vélo.

Remerciements à l’ONF ( www.onf.fr ), aux Laboratoires Fenioux ( www.laboratoires-fenioux.com ) et à l’Aéroclub de Cayenne - Rochambeau pour leur soutien logistique.


Autres chroniques de l'année 2004

Raccourcis  




passer une petite annonce



passer une annonce de covoiturage





passer une annonce d’emploi












associations, postez vos actualités


participez au courrier des lecteurs

La Guyane c’est ici 

La qualité de l’Air avec
ATMO


 

Photothèque

Lancements 2022
Lancements 2022
Vol 259 Ariane 5

Annonceurs

Régie publicitaire